mardi 19 février 2013

Lecture comparative entre LIRE ASSIA DJEBAR! et PASSIONS IMPUNIES

Par Henriette Alègre .
 
A propos de Lire Assia Djebar ! , ouvrage collectif, Edition La Cheminante 2012.
et de Passions Impunies, George Steiner,  Londres, essais faber and faber 1996 - Gallimard 1997. Taduit de l’anglais par Pierre Emmanuel  Dauzat et louis Evrard.
 
« Lire, c’est comparer » écrit G. Steiner dans Passions impunies :
« Tout acte de recevoir une forme signifiante, dans le langage, l’art, la musique est comparatif (…).Nous cherchons à comprendre, à situer l’objet devant nous – texte, peinture, sonate – en lui offrant le contexte intelligible et informatif d’une expérience préalable et apparentée. Nous nous tournons intuitivement vers l’analogie et le précédent, vers des traits qui sont comme de famille (par conséquent « familiers ») et qui rattachent la chose nouvelle à un contexte reconnaissable ». (Lire en frontalier, p.119).
 
« Le lecteur peu commun » représenté dans le tableau de Chardin,  « Un philosophe occupé de sa lecture » (1734)
Rapprocher les deux ouvrages cités, c’est s’attarder sur la conception du « Lecteur peu commun » que G.Steiner dégage de ce  tableau, pour tenter de la mettre en résonnance avec la démarche créatrice que présente l’ouvrage collectif « Lire Assia Djebar ».
 Cette démarche originale  traduit  une conception de l’engagement  qui fait  écho à la signification de l’engagement du « lecteur peu commun » : cet engagement est total, dans sa réponse et sa responsabilité,  lié à son expérience, à ses habitus culturels .
L’intellectuel, ici, comme le « lecteur peu commun » est « un être humain qui lit, une plume à la main » et pour qui « bien lire, c’est être lu par ce que nous lisons » (que les auteurs soient plasticienne, poète, psychologue, écrivain, comédien, universitaire, traducteur – et qu’il travaille avec des mots ou d’autres matériaux ).
 
Place, rôle, valeurs  dans les représentations iconographiques 
La photographie du  tableau d’Anne marie Carthé « Hommage à Assia djebar » (citation , démarche, poème) précède les actes de lecture des auteurs et les accompagne par des focalisations sur des détails de son œuvre, comme « le  lecteur peu commun »  en « envoi » et au centre du livre Passions impunies,  analyse le tableau de Chardin, chacun adoptant sans doute, une visée transmissive et réflexive.
« Hommage à Assia Djebar » livre une représentation  du  regard du lecteur, plongé, habité (habillé) de façon dynamique dans et par la densité des pages de son œuvre. Habité, éclairé  et « habillé «  sobrement, pour l’occasion, en hommage  à une œuvre de marque.
Ce regard, abstrait, rappelle aussi la vision classique de l’acte de lire : les liens entre l’auteur et le temps, le lecteur et le texte. Ce regard s’inscrit dans un espace esthétique : espace intérieur et extérieur sont délimités, dans ce tableau par la la présence symbolique du  moucharabieh. Mais cet élément contribue à définir ces espaces comme complémentaires : la lecture dans son espace intime et la lecture dans son espace social, comme interaction et transmission.
Ainsi, ce tableau  signifie bien qu’il s’agit là  d’un « lecteur peu commun », un peu  comme « le philosophe occupé de sa lecture », qui, à son époque, représentait le lecteur savant .

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